Nouvelle Loi sur la Santé du Travail

L'entrée en vigueur des principales mesures de la loi Santé au travail du 2 août 2021 approche à grands pas. Son application est en effet fixée au 31 mars 2022.

Le renforcement de la Prévention des Risques en Entreprise

"La Loi Santé intègre les risques psychosociaux dans l'évaluation des risques dans une démarche de prévention santé/sécurité et d'amélioration de la qualité de vie au travail. Cette extension se retrouve également dans la prévention des risques chimiques dans l'entreprise".

L'article L.4412-1 du code du travail prévoit désormais que "les règles de prévention des risques pour la santé/sécurité des travailleurs exposés à des risques chimiques sont déterminées par décret en Conseil d’Etat, en tenant compte des situations de polyexpositions".

Le projet de décret qui circule actuellement précise que cette notion de polyexposition renvoie à une exposition successive ou simultanée. S'agissant des substances cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR), l'article R.4412-7 du code du travail précise que dans le cas d’activités comportant une exposition à plusieurs agents chimiques dangereux (ACD), l’évaluation prend en compte les risques combinés de l’ensemble de ces agents.

Au terme de l'article L.4121-3 du code du travail, "le CSE et la commission CSSCT devront désormais apporter leur contribution à l’évaluation des risques professionnels. Le CSE et/ou la CSSCT devient un interlocuteur à part entière au stade de l’évaluation des risques professionnels. Dans le cadre du dialogue social, il participe à l’évaluation des risques, conjointement avec l’employeur, y compris dans les entreprises de moins de 50 salariés".

Une mise à jour renforcée du DUERP

La loi Santé au travail renforce l'obligation de transcription et de mise à jour du DUERP. En 2016, seules 45 % des entreprises avaient mis en place ou actualisé leur DUERP selon une étude de la Dares de 2019". Le principe reste celui d'une mise à jour annuelle dans les entreprises d'au moins 11 salariés, lors de toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé/sécurité ou les conditions de travail et lorsqu’une information supplémentaire intéressant l’évaluation d’un risque dans une unité de travail est recueillie.

Le DUERP doit répertorier l'ensemble des risques professionnels auxquels sont exposés les salariés et d'assurer la traçabilité collective des expositions".

Le DUERP doit être conservé dans sa version initiale et ses versions successives à compter de la date d'entrée en vigueur du décret. La durée de conservation ne pourra pas être inférieure à une durée de 40 ans qui est la durée moyenne d'une carrière et la durée pendant laquelle certaines pathologies et cancers peuvent se déclarer.

Pour les entreprises dont l'effectif est égal ou supérieur à 150 salariés, ces dispositions entrent en vigueur au 1er juillet 2023 ; au 1er juillet 2024 pour les entreprises de moins de 50 salariés. Le projet de décret précise que jusqu'à l'entrée en vigueur de l'obligation de dépôt, l'employeur conserve les versions successives du DUERP sur support papier ou dématérialisé.

Selon le projet de décret, le DUERP et ses versions antérieures sont tenus à disposition :

  • Des travailleurs pour les versions à compter de leur entrée dans l’entreprise ;
  • Des anciens travailleurs, pour les périodes durant lesquelles ils ont travaillé dans l’entreprise ;
  • Des membres du CSE ;
  • Du service de prévention et de santé au travail ;
  • Des agents du système d’inspection du travail ;
  • Des agents des services de prévention des organismes de sécurité sociale ;
  • Des agents des organismes professionnels de santé, de sécurité et des conditions de travail des branches d’activité présentant des risques particuliers ;
  • Des inspecteurs de la radioprotection.
La consultation du CSE sur le DUERP et sur ses mises à jour est prévue quel que soit l'effectif de l'entreprise. Il pourra formuler un avis négatif en cas de désaccord sur l'évaluation des risques.

Le DUERP doit également être transmis aux services de santé au travail à chacune de ses mises à jour. "On passe d'une information quérable à une information portable".

De la QVT à la QCVT

La loi Santé a modifié la négociation sur la QVT ; on parle aujourd'hui de QVCT [qualité de vie et conditions de travail] et non plus de QVT. Dans les entreprises dotées de sections syndicales d’organisations représentatives, il est obligatoire de négocier, au moins une fois tous les quatre ans sur la QVCT (et non plus seulement sur la QVT). A défaut d’accord ou en cas de non-respect de ses stipulations, l’employeur devra engager, chaque année, une négociation sur l’égalité professionnelle et la QVCT :

  • Sur les thèmes obligatoires prévus à l'article L.2242-17 du code du travail (articulation vie privée et vie professionnelle, modalités du droit à la déconnexion, dispositifs de régulation de l’utilisation des outils numériques, etc.) ;
  • Sur le thème facultatif prévu à l'article L.2242-19 du code du travail : la prévention aux effets de facteurs de risques professionnels ;
  • Et sur un nouveau thème facultatif prévu à l'article L.2242-19-1 du code du travail : la qualité des conditions de travail, notamment sur la santé et la sécurité au travail et la prévention des risques professionnels.

Renforcement de la formation des élus

A compter du 31 mars 2022, la formation santé/sécurité des membres de la délégation du personnel du CSE sera de cinq jours minimum pour l'ensemble des membres du CSE. En cas de renouvellement du mandat d'au moins trois jours, sauf pour les membres de la CSSCT dans les entreprises d’au moins 300 salariés (au moins cinq jours).

Le projet de décret précise que les Opco pourront prendre en charge les frais de formation, du salaire dans la limite du Smic horaire par heure de formation et des frais annexes (frais de transport, de restauration, d'hébergement, etc.) pour les entreprises de moins de 50 salariés. Dans les entreprises d'au moins 50 salariés, la prise en charge est assurée par l'employeur.

Passeport de prévention

Le passeport de prévention recense l’ensemble des attestations, certificats et diplômes obtenus par le travailleur dans le cadre des formations relatives à la santé et à la sécurité au travail. L'entrée en vigueur du passeport formation n'est pas encore fixée ; nous attendons le décret. Elle doit intervenir au plus tard le 1er octobre 2022.

Le suivi médicale des salariés est étendu

La loi Santé au travail a créé une visite de mi-carrière.
Cette visite est réalisée soit par le médecin du travail, soit par un infirmier de santé au travail "exerçant en pratique avancée". Cette visite vise à établir un état des lieux de l’adéquation entre le poste de travail du salarié et son état de santé, à date, en tenant compte des expositions à des facteurs de risques professionnels. Elle a également pour objectif d'évaluer les risques de désinsertion professionnelle, en prenant en compte l’évolution des capacités du travailleur en fonction de son parcours professionnel, de son âge et de son état de santé. Enfin, elle doit sensibiliser le salarié aux enjeux du vieillissement au travail et à la prévention des risques professionnels. A l'issue de cette visite, le médecin du travail formule des propositions écrites (mesures prévues à l’article L. 4624-3 : mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou du temps de travail) après échange avec le salarié et l’employeur.

Dossier médical partagé du salarié

"Le dossier médical partagé (DMP) est un dossier numérique visant à favoriser la prévention, la qualité, la continuité et la coordination des soins entre les professionnels de santé. Il est ouvert par l’assuré ou, avec son consentement, par la CPAM ou par un professionnel ou un établissement de santé. Il est destiné à contenir l’historique des soins et traitements des 12 derniers mois et toutes autres informations médicales (résultats d’examen par exemple) ou utiles au suivi médical du patient (allergies, personnes à prévenir en cas d’urgence …)". Y ont accès les professionnels de santé autorisés par le patient (médecin traitant, infirmier, pharmacien…).

Quant au dossier médical de santé au travail (DMST), il ne sera plus seulement accessible au médecin du travail, mais également au collaborateur, à l'interne en médecine du travail, à l'infirmier, au médecin praticien correspondant (collaborant avec les SPSTI).

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